Juzan, Léa (2019) L'enfant refusé. École doctorale Droit et Science Politique (Toulouse).

Preview

Text Download (5MB) | Preview

Abstract

À une époque où le désir d’enfant est au cœur du débat public et où l’enfant apparaît aux yeux de tous comme une source de bonheur et d’épanouissement, cette thèse se propose d’interroger l’adéquation de la législation à la situation où, à l’inverse, un parent refuserait son enfant. La relation parent-enfant est aujourd’hui conçue comme indissociable du sentiment affectif. A contrario, il s’agit ici d’étudier la place laissée par le législateur à la traduction juridique de l’absence de lien affectif tant dans le refus du statut de parent, que dans le refus de la fonction parentale.Lorsque le statut de parent est refusé ab initio, la possibilité pour le parent de traduire juridiquement l’absence de lien affectif est assez importante. Ainsi, la volonté parentale, bien que son poids puisse varier selon le parent qui l’exprime, peut assez largement empêcher la naissance de l’enfant, aussi bien que l’établissement de sa filiation.En comparaison, lorsque le refus s’exprime alors que la filiation de l’enfant est déjà établie, la possibilité pour le parent de traduire juridiquement l’absence de lien affectif est très atténuée. La filiation reposant sur l’engendrement aussi bien que la filiation adoptive ne peut être rompue que lorsque des conditions strictes sont réunies.La possibilité pour le parent dont la filiation est établie de se soustraire aux obligations qui en découlent est également très limitée. Ainsi, la possibilité pour le parent de se soustraire aux aspects objectifs de la fonction parentale, que sont la prise en charge financière de l’enfant et la transmission de son nom et de son patrimoine, est extrêmement encadrée. L’absence de lien affectif n’est prise en compte que dans des situations extrêmes où le comportement particulièrement répréhensible de l’enfant rendrait intenable le maintien des obligations parentales. Le droit ignore, de manière plus criante encore, l’absence de lien affectif dans les aspects subjectifs de la fonction parentale. En effet, lorsque la prise en charge de l’enfant est assurée par l’un des parents, le droit se repose sur ce dernier et le laisse seul juge de l’opportunité de traduire juridiquement le refus de l’autre. Ce n’est que lorsqu’aucun des deux parents n’exerce l’autorité parentale que le droit sera forcé de prendre en compte l’absence de lien affectif et de pallier la carence parentale.

At a time when the desire for children is at the heart of public debate and when children appear to everyone as a source of happiness and fulfilment, this thesis aims to question the adequacy of the legislation to the situation where, on the contrary, a parent would refuse his child. The parent-child relationship is nowadays conceived as inseparable from emotional feelings. By contrast, this thesis aims to study how the legislator operates a legal translation (if any) of the absence of an emotional bond whether it is about the refusal of parental status or the refusal of the parental function.When parental status is refused ab initio, the possibility for the parent to legally translate the absence of an emotional bond is quite important. Thus, the parental will, although its weight may vary according to which parent expresses it, can largely prevent the birth of the child, as well as the establishment of its filiation.In comparison, when the refusal is expressed after the child's filiation has already been established, the possibility for the parent to legally translate the absence of an emotional bond is greatly reduced. Both filiation based on giving birth and adoption can only be broken when strict conditions are met. The possibility for the parent whose filiation is established to avoid the obligations arising therefrom is also very limited. Thus, the possibility for the parent to avoid the objective aspects of the parental function, which are the financial care of the child and the transmission of his name and estate, is extremely restricted. The absence of an emotional bond is only taken into account in extreme situations where the child's particularly reprehensible behavior would make it untenable to maintain parental obligations. Even more blatantly, the law ignores the absence of an emotional bond regarding the subjective aspects of parenting. Indeed, when the care of the child is provided by one of the parents, the law rests on the latter and let him alone to decide to take or not the opportunity to translate juridically the refusal of the other. Only when neither parent exercises parental authority will the law be forced to take into account the lack of emotional connection and to compensate for parental deprivation.