Bétaille, Julien (2023) L’argument scientifique dans le contentieux de la responsabilité environnementale. Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger (RDP) (n° 2). p. 350.

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Abstract

Dans le champ de l’environnement, la tentation épistocratique identifiée par Alexandre Viala est relativement courante. Dans l’histoire de la pensée d’abord, de Hans Jonas à Michel Serres. Mais aussi dans la période contemporaine, peut-être encore plus qu’avant, à mesure que la menace écologique se rapproche. En témoigne une forme de néo-militantisme juridique qui s’enracine autour de l’idée des droits de la nature ou du concept de limites planétaires. La science est parfois instrumentalisée en argument d’autorité.
Néanmoins, si on laisse de côté ce qui n’est, pour le moment, qu’un discours militant parmi d’autres, il reste que, le droit de l’environnement étant consubstantiellement lié aux connaissances scientifiques, son application par le juge, notamment dans le cadre des recours en responsabilité, est nécessairement confrontée à cette tension entre l’être et le devoir-être. L’application du droit par le juge nécessite le recours à la science, mais cela ne veut pas dire pour autant que l’être supplante le devoir-être dans le travail du juge.
L’objet de cet article est ainsi d’appréhender la place de l’argument scientifique dans l’application du droit par le juge (administratif) de la responsabilité environnementale, cela sur la base d’une analyse de nombreuses décisions relatives à la lutte contre les changements climatiques, à la pollution (de l’air et par les algues vertes) et à la protection de la biodiversité (ours, cétacés, grand tétras). La thèse que nous défendons est qu’en matière de responsabilité environnementale, l’hypothèse épistocratique n’est pas vérifiée. En effet, si l’argument scientifique y occupe une place centrale, il n’en reste pas moins auxiliaire.
En premier lieu, la centralité de l’argument scientifique ressort de son omniprésence dans le contentieux de la responsabilité environnementale, tout comme de sa nécessité pour satisfaire les conditions de la responsabilité. Néanmoins on observe que les arguments scientifiques utilisés par le juge sont souvent « de seconde main », c’est-à-dire issus d’expertises publiques ou parapubliques, et non directement de publications scientifiques universitaires, ce qui s’explique probablement par la culture plus administrative qu’universitaire du juge administratif. En second lieu, l’auxiliarité de l’argument scientifique tient au fait qu’il ne prévaut pas sur l’argument juridique. Il ne remplace pas la norme dans l’établissement de la faute ou du préjudice et la causalité juridique demeure, dans bien des cas, assez éloignée de la causalité scientifique.

Item Type: Article
Language: French
Date: 1 March 2023
Refereed: Yes
Place of Publication: Issy-les-Moulineaux
Uncontrolled Keywords: Environment, Epistocracy, Liability, Litigation
Keywords (French): Environnement, Epistocratie, Responsabilité, Contentieux
Subjects: A- DROIT > A3- Droit public
A- DROIT > A3- Droit public > 3-3- Droit administratif
A- DROIT > A4- Droit privé > 4-10- Droit de l’environnement
Divisions: Institut des Études Juridiques de l'Urbanisme et de la Construction (Toulouse)
Site: UT1
Date Deposited: 20 Apr 2023 10:49
Last Modified: 20 Apr 2023 11:00
URI: https://publications.ut-capitole.fr/id/eprint/47778
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