Fohrer-Dedeurwaerder, Estelle (2004) La prise en considération des normes étrangères. Other doctoral school.

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Abstract

C’est une thèse qui a été dirigée par le Professeur B. AUDIT, et qui a été soutenue le 9 décembre 2004. Primée par l’Université Panthéon-Assas (Paris II), elle a également concouru aux prix de thèse décernés par la Chancellerie des Universités de Paris.

La prise en considération est une technique juridique inhérente au droit international privé, mais elle est également utilisée en droit interne, notamment pour tenir compte des règles religieuses ou sportives. Dans la science du conflit de lois, souvent qualifiée d’« aveugle », elle contribue à y introduire de la justice matérielle.

Les normes étrangères ne sont pas toujours appréhendées dans l’ordre juridique du juge saisi comme telles. Il arrive en effet que ce dernier opte pour la prise en considération d’une règle étrangère plutôt que pour son application. Pour ce faire, il l’intègre dans le présupposé de la loi compétente, laquelle lui fournit seule la solution du litige. Par exemple, au lieu d’appliquer une loi de police étrangère prohibant le transfert de devises, au détriment de la loi française supposée choisie par les parties au contrat litigieux, le juge peut préférer l’insérer dans le présupposé de la loi française afin d’admettre la libération du débiteur, dès lors qu’elle revêt les caractères d’imprévisibilité et d’irrésistibilité de la force majeure ou du cas fortuit au sens de l’article 1148 du Code civil.
Il en est de même s’agissant des décisions étrangères (jugements, actes publics ou quasi-publics), ne serait-ce que parce que toutes ne bénéficient pas d’un régime de reconnaissance, soit que leur objet touche à la souveraineté étatique étrangère, soit qu’elles n’en remplissent pas les conditions. Elles peuvent en ce cas, à l’instar des règles étrangères, être consultées par le juge comme une donnée de fait, un datum. Elles ne sont alors considérées que comme un fait juridique auquel la loi appliquée attache certains effets. Ainsi, une condamnation pénale prononcée à l’étranger peut être prise en compte par l’autorité publique française devant se prononcer sur une demande de naturalisation (art. 21-23, al. 2, du Code civil).

Règle ou décision, la norme étrangère peut être prise en considération à trois titres différents : en premier lieu, elle peut remplir le rôle de datum-condition, c'est-à-dire qu’elle peut être une condition de l’application d’une loi (le principe de double incrimination posé à l’art. 113-6, al. 2, du Code pénal en est l’exemple topique) ; en deuxième lieu, elle peut servir de datum-renseignement, la norme étrangère renseignant le juge sur les faits du litige à seule fin de l’application d’une loi (hypothèse envisagée par l’art. 21-23 du Code civil précité) ; enfin, elle peut être considérée comme un local-datum – expression empruntée à la doctrine américaine –, la norme étrangère s’imposant au juge comme une réalité matérielle dont il peut difficilement ignorer l’existence au moment de résoudre le différend qui lui est soumis ; en conséquence, il se trouve contraint d’appliquer telle disposition de la loi compétente plutôt que telle autre (situation illustrée par la libération du débiteur du fait de la force majeure, plutôt que sa condamnation à verser des dommages-intérêts pour inexécution de son obligation contractuelle).

Ainsi définie, la prise en considération des normes étrangères trouve un terrain fertile dans le domaine du droit public, généralement exclu du conflit de lois et de la procédure d’exequatur. Celui du droit privé n’en est pas moins riche, bien qu’il soit l’objet des méthodes de droit international privé.
Dans tous les cas, la fonction particulière de la norme prise en considération dans le syllogisme judiciaire (à savoir, la mineure) explique la spécificité des réponses qu’appellent, non seulement son régime procédural (office du juge, établissement de son contenu, contrôle de la Cour de cassation), mais également la question de sa conformité à l’ordre public international (celui-ci étant parfois volontairement écarté par les juges par souci de justice matérielle).

Item Type: Thesis (UNSPECIFIED)
Language: French
Date: 9 December 2004
Keywords (French): loi étrangère, décision étrangère, application, donnée de fait, syllogisme judiciaire
Subjects: A- DROIT > A6- Droit international > 6-1- Droit international privé
Divisions: other
Ecole doctorale: Other doctoral school
Site: UT1
Date Deposited: 12 May 2016 09:31
Last Modified: 02 Apr 2021 15:53
URI: https://publications.ut-capitole.fr/id/eprint/21658
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